12 novembre 2020
On se fait les malles !
Journée spéciale ce 12 novembre 2020 sur la base : on nous a annoncé depuis deux jours que toutes les malles des partants sur la première rotation du bateau R0 doivent être prêtes pour 17h. Certains les ont déjà préparées depuis quelques jours, mais pour la plupart, une dizaine d’entre nous, c’est bouclage de dernière minute dans la journée, avec une activité intense de rangement et nettoyage dans le dortoir ! De mon côté, afin de vérifier le volume qui va voyager avec moi, j’en ai profité également pour faire ma valise, ce qui m’a permis d’ajuster le remplissage des malles, et d’être sûr que ma valise pourra fermer dans quelques jours.
Dans l’après-midi, sur les passerelles, on voyait passer les hivernants, souvent par groupe de 2, portant les malles vers Geophy, où elles étaient souvent pesées, puis étiquetées, et enfin entreposées à l’extérieur, une fois prêtes, en attendant la prise en charge de 17h. Ensuite Martin, campagnard d’été, ainsi que quelques hivernants (Alain, Loïc, Pol) et moi-même au début, nous les avons chargées sur un véhicule, afin de descendre pour les stocker dans le bâtiment AGI en bas de l’île des Pétrels, où elles attendront une prise en charge par le bateau en fin de campagne d’été, dans 3 mois. Nous les reverrons en France dans le courant du mois de mai, voire en juin. La dizaine de partants que nous sommes, ainsi que quelques camarades hivernants partants sur la rotation suivante, sommes ainsi débarrassés de l’essentiel, en volume du moins, de nos affaires personnelles de l’année.
Il fallait donc bien réfléchir à ce qui ne me serait pas nécessaire durant les 6 prochains mois, à ce que je garderais avec moi pendant le voyage. Et comme j’ai fait ma valise, mon sac à dos, pour constater que tout tenait, je suis quasiment prêt à partir dès ce jeudi soir ! Drôle d’ambiance, pour nous qui partons, mais aussi pour ceux d’entre nous qui vont rester quelques semaines de plus, et qui nous voient préparer nos affaires. Notre belle histoire commune ici se termine, c’est le début de la fin. L’Astrolabe n’est pas encore visible depuis la base ce jeudi soir, mais il se rapproche : situé à 64°30’S et 145°40’E, il est à plus de 300km à l’est/nord-est de DDU, il progresse sans trop de problème dans le pack. Nous le verrons ainsi très probablement demain, s’il n’est pas caché derrière un iceberg, mais en raison de la tempête qui s’annonce cette nuit, et qui devrait durer une partie de la journée de demain, nous ne devrions pas forcément voir nos successeurs dans les prochaines 24 heures. Samedi, en revanche, c’est quasi certain…
Ce matin, j’ai lâché mon dernier ballon, avec Julien notre mécanicien de précision/outilleur, demain et samedi c’est au tour de Michel, et ensuite nous serons avec notre relève, ce ne sera donc plus pareil. J’achève ainsi ma dernière vacation seul, comme j’en ai vécu des dizaines d’autres. J’ai aimé ce travail, ces vacations mêlant observation et prévision, à l’ancienne, avec une temporalité particulière, au rythme des saisons polaires si belles et si marquées. La nostalgie l’emporte un peu en ce moment, mais elle n’est pas si triste, je crois, elle est teinte de fierté d’être revenu ici et d’avoir vécu ce second hivernage dans de superbes conditions.
Le tourbillon de la passation va nous emporter dès samedi au plus tard, jusqu’à notre montée sur le bateau, dans environ une semaine, avec peut être un départ le 19-20 ? C’est toujours difficile de savoir précisément, car très dépendant des conditions météo également. La seule véritable contrainte de temps est le vol du 29 novembre sur lequel nous avons une réservation. Normalement, avec environ 5 voire 6 jours de mer, il y a de la marge, mais l’Astrolabe a également ses contraintes, donc nous verrons bien, on ne devrait pas être très loin du 19-20, dans une semaine.
Lundi après-midi, j’ai eu la joie de revoir une hivernante de choix de ma TA59. : Caro, notre médecin, qui est de retour car elle va être, pour la seconde fois, médecin du raid qui part vers Concordia la semaine prochaine. J’attendais sa venue, bien sûr, et je suis ravi de l’avoir vue pendant une grosse demi-heure, pas davantage hélas, car elle venait aussi pour récupérer auprès de Sarah les médicaments que cette dernière lui avait préparés pour la base annexe de Prudhomme, et le raid. J’espère vraiment la revoir, mais elle loge à la base Robert Guillard de Cap Prudhomme, certes proche (5km) mais les aller-retour en véhicule ne se font pas si simplement que cela, du moins pas sans raison professionnelle… En tout cas c’était très drôle et sympa de la revoir ici, à côté de Sarah, deux super médecins de mission en tout cas, j’ai été gâté à chaque fois.
Mardi, belle journée calme et encore du plein soleil : en bordure d’un trou d’ozone encore très vaillant cette année, nous avons mesuré un indice UV de 8,3 au plus fort, certains ont pris de sacrés coups de soleil lors de la sortie du jour, pour voir les phoques ! Les journées sont longues, quand c’est le plein soleil, on mesure quasiment 18h d’ensoleillement : de 3h15 à 21h15 environ, c’est l’été ! Et plus d’obscurité la nuit, bien sûr, à 3-4 semaines à peine du jour polaire, tout juste une légère pénombre vers minuit...
Hier 11 novembre, nous avons eu droit à la cérémonie officielle, présidée par Régis, et nos 3 militaires (Sarah, Malik, Loïc) ont donc revêtu leur tenue de cérémonie pour l’occasion, pour la troisième fois de l’année (après le 8 Mai et le 14 Juillet), Régis nous a lu un message ministériel, suivi d’un petit cocktail. Ensuite, après le déjeuner, nous avons ENFIN réussi ce qui paraissait si difficile : faire une photo de mission à 24, tous ensemble ! Les 2 autres photos de mission que nous avons faites depuis notre arrivée, n’avaient pas réussi à atteindre ce nombre. La symbolique est belle, assez forte je crois : en fin de mission, au moment où pour diverses raisons, nous pourrions être le plus lassés les uns des autres, nous arrivons tout de même à nous réunir tous ensemble quelques minutes, le temps de quelques photos. Une bien belle manière d’achever notre histoire commune…
Enfin hier et aujourd’hui, Elian, campagnard d’été expérimenté, a, comme chaque année, rasé les congères aux manettes du Kassbohrer, devant notre bureau météo, Geophy, et le dortoir : en quelques heures, il a donc détruit le travail patient d’accumulation de neige de la Nature de tout l’hiver ! Nous avons donc retrouvé une vue parfaite sur l’horizon depuis ces fenêtres depuis longtemps obstruées par la neige. Sans cette action, le niveau des congères baisserait certes par la fonte estivale, mais elles n’auraient que bien peu de chance de disparaître complètement…
Place à la tempête en tout cas maintenant, notre dernière probablement, je me sens globalement plus léger, plus que jamais prêt pour le départ, avec toutes mes affaires empaquetées ! A bientôt pour l’arrivée de l’Astrolabe !
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