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Itinéraires polaires
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13 juin 2007

Retour programmé ?

Derrière ce titre énigmatique se cache un fait important, je ne parle pas là de mon retour en France, mais de mon futur retour en Alaska. En effet, aujourd'hui, au détour d'une conversation, mon encadrant de stage David Atkinson m'a déclaré que tant qu'il sera là (à l'International Arctic Research Center), il y aura toujours une place pour moi. Il a ajouté qu'il n'avait pas pensé me proposer sérieusement de rester jusque là, puisqu'il savait que j'étais lié à Météo-France, étant employé par notre service national. Mais j'ai bien senti qu'il espérait que je revienne, plus tard. Je lui ai demandé s'il comptait quitter l'Alaska prochainement, il m'a répondu que non, il y avait tant de travail ici... Ensuite, je lui ai déclaré, ce qui est la stricte vérité, que je souhaitais vraiment travailler comme prévisionniste, chose qu'il a parfaitement comprise, et que Météo-France m'offrirait certainement à plus ou moins court terme de le faire. Cela dit, il m'a cité l'exemple d'un australien qui travaille à l'IARC, qui a fait de la prévision pendant 10 ans avant de revenir vers la recherche. Impossible d'affirmer aujourd'hui que je ne suivrai pas une telle trajectoire. J'ai suffisamment dit que le fait de m'imaginer lié à vie (professionnelle du moins !) à Météo-France me semblait surréaliste pour accorder quelque crédit à ce genre d'hypothèse. Je lui ai même répondu qu'au sein de Météo-France, cela arrivait de temps en temps également.

D'une certaine façon, il m'a posé la question de savoir si je reviendrais sérieusement travailler (faire une thèse, concrètement) plus tard à Fairbanks. La question ne s'est d'un côté jamais posée, puisqu'il était clair et il reste clair que je reprends l'avion vendredi et que je vais prendre un poste Météo-France dès le mois d'août, en France. Mais d'un autre côté une partie de moi-même n'a cessé de penser au moment, au contexte dans lequel je revivrai le même genre d'expérience que celle que j'ai vécue cet hiver. Sans que cet instant ne se matérialise d'aucune façon, juste comme une quasi-certitude onirique. Il vient de me donner une raison concrète de vouloir revenir, comme si j'en avais réellement besoin. Mais voilà, il ne faut aussi pas négliger le fait que si je reviens, contrairement à ce stage de longue durée certes, ce sera pour m'y installer plus durablement.

Dans le contexte actuel, c'est naturellement inenvisageable, et je n'y suis de toutes façons pas prêt, comment supporter l'idée d'un éloignement si grand et si lointain, qui fait le charme et la menace d'une telle hypothèse, de ma famille, de mes amis, de la Corse ? Il est clair que si j'ai si bien vécu tout le temps que j'ai passé ici, dans les conditions qui ont été celles-ci, c'est parce qu'au bout je savais bien que je rentrerais et que je reverrai tout ce qui m'est familier et cher. J'ai simplement fait un long voyage. S'installer, c'est autre chose. Je ne dis pas non, mais c'est clairement impossible aujourd'hui, pour des raisons donc d'ordre "mentales" mais également matérielles, comme je l'ai expliqué précédemment. Il n'en reste pas moins que cette fascination pour la Nature, les grands espaces me poursuit, cette envie de me fondre complètement dans le décor, loin de la folie collective des hommes, auprès de la sagesse des éléments. Un cadre grandiose, une tranquilité que la France ne pourra très vraisemblablement jamais m'offrir. Je vais donc quitter l'Alaska dans 72 heures en me demandant combien de temps durera cette séparation...

Les circonstances de la vie m'offriront-elles un voyage retour ? Probablement. Au moins en tant que touriste. Le "rêve n'est pas donné mais ici le dépaysement est extérieur, intérieur, le climat joue son rôle apaisant en endormant de longs mois la faune et la flore, laissant l'Homme face sa vérité, celle d'un être qui est né par elle, et qui mourra en son sein. Quand tout se fige, la magie s'opère en unifiant l'Etre et les éléments qui l'entourent. Les gens qui sont là savent bien que le froid est le révélateur, le moteur qui donne, d'une certaine façon, un sens à la poursuite de la vie, dans ce cadre apparemment si hostile. J'aime le froid car il est un antidote à l'oisiveté, tant morale que physique. Le froid m'a rendu meilleur, je crois. En y repensant, ce n'est pas par hasard si j'ai passé mes hivers en Corse dans notre grande et belle maison sans chauffer, j'y ai trouvé une forme d'authenticité, une énergie qui m'a poussé vers le succès de mon entrée à l'Ecole Nationale de la Météorologie. Je suis convaincu que je n'aurais pas été capable de faire cela dans un contexte estival, ou même sans aller jusque là dans un niveau de "confort" dit normal. Le froid m'a eveillé et m'a forcé à extraire le meilleur de moi-même, ne serait-ce que pour me réchauffer, en faisant chauffer mon cerveau...

J'ai déjà eu l'occasion de dire sur ce blog tout le bien que je pensais du froid, notamment lors de la période hivernale, aujourd'hui ça me manque. Je reviendrai en Alaska.
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Commentaires
A
Pour étayer ton ressenti sur l'énergie que donne le froid : en Polynésie, le maître-mot est "fiu" et loin d'être un lâcher-prise qui peut paraître le summum de la zen-attitude pour les stressés de nos pays aux climats tempérés, c'est un laisser-aller total, un "à quoi bon" faire aujourd'hui ce qu'on pourra faire le lendemain, voire plus tard encore ! car demain la chaleur, le soleil, la mer et la terre toutes deux nourricières, seront toujours là, alors pourquoi se bouger ! (et je passe sur l'improbabilité future de ce constat!)<br /> Mes voeux t'accompagnent pour tes projets : tu viens d'agrandir le cercle de ton envol du nid et le désir, la curiosité, l'attrait et le plaisir que te procure la découverte de nouveaux pays, nouveaux climats, nouvelles mentalités te feront poursuivre ton exploration, l'éloignement des tiens ne sera plus alors une difficulté mais une nécessité heureuse.<br /> Je t'embrasse, Alexandra
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