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Itinéraires polaires
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5 janvier 2020

Une journée pas comme les autres

Ce début d’année 2020 fut assez tranquille sur la base, rythmé par l’accalmie progressive de la tempête qui nous a affecté le 31 et le 1er. Dans la continuité de cette grosse perturbation, le ciel est resté généralement bien gris, avec un vent modéré le 2, puis un vent calme depuis vendredi 3. Chacun a vaqué à ses occupations, une petite routine s’installant fort logiquement. J’avais évoqué le 1er au soir lors de notre petit briefing météo la possibilité d’avoir du brouillard, un phénomène rare ici (ça n’arrive pas tous les ans), vendredi ou samedi, avant le retour probable du soleil pour dimanche 5. En effet, avec la tombée du vent, et des conditions restant très humides, avec de petites chutes de neige tous les jours, le brouillard semblait possible pour la fin de semaine. Le modèle ciblait vendredi après-midi ou samedi. Finalement, le brouillard est arrivé… ce dimanche !

Ce dimanche fut donc une journée météorologiquement compliquée. J’étais déjà de service hier samedi 4, où j’ai guetté le brouillard, qui ne s’est pas montré, contrairement à la neige, comme les jours précédents.  J’envisageais plutôt sereinement une amélioration pour ce dimanche. En raison du beau temps attendu, un avion venant de Dome C/Concordia, la base franco-italienne située en altitude sur le continent était attendu, pour faire un aller-retour dans la journée. Pour ce faire, et bien préparer le vol, il me fallait commencer à envoyer des observations météo de DDU et du vent à la piste voisine de D10 dès 6h ce matin. En effet, les pilotes ont besoin de connaître le temps à destination 2 heures avant le décollage, pour préparer leur vol, puis on leur envoie un rapport détaillé du temps sur notre site toutes les heures, jusqu’à l’arrivée de l’avion, et même jusqu’au redécollage (l’avion ne reste jamais posé plus d’une heure à D10, en pratique), voire 1 ou 2 heures après, en cas de nécessité de rebrousser chemin.

Ces « journées aéronautiques » apportent une variété très intéressante mais parfois fatigantes à nos journées classiques de travail, surtout quand il faut commencer les rapports météo horaires à 3h du matin, ce qui arrive parfois. Donc, je me lève un peu avant 6h, attendant plutôt du beau temps, je me rends compte par la fenêtre de ma chambre que le ciel est gris, et bas, mauvaise surprise. Je me dirige vers le bureau météo pour envoyer, comme prévu, mon premier mail d’observations de la journée. Vers 7h, pour le second rapport, j’aperçois que la couche de stratus (nuages bien bas et gris) se déchire depuis le continent, et que ce mouvement semble gagner DDU. Je suis alors confiant pour la suite et j’élabore assez sereinement ma prévision du jour, maintenant un soleil assez largement présent, malgré quelques passages nuageux. Et effectivement, entre 7h15 et 8h45, le soleil perce bien, dévoilant la couche de stratus avec de jolis contrastes de couleurs, comme on le voit sur les photos jointes à ce billet, et comme on en voit rarement par ici, ces nuages n’étant pas fréquents, en tout cas pas en nappe uniforme et très basse comme cela.

Je prépare tranquillement mon lâcher de ballon, dans des conditions idéales, plutôt douces (-0,8°C) et avec 7km/h de vent, donc bien calmes. Au moment du lâcher, je m’aperçois que le vent continental bien sec qui avait poussé cette couche de stratus vers le large est tombé, et qu’un vent maritime a repris le dessus, que le ciel se recouvre… Une demi heure après, le brouillard tombe sur DDU, avec une visibilité d’environ 400-500m au plus épais (on parle de brouillard quand la visibilité tombe en dessous du kilomètre). Autant mes mails d’observation météo de 7h puis 8h étaient encourageants pour l’avion, autant dès celui de 9h, puis encore plus à 10h, le vol est suspendu, repoussé, en attendant une amélioration des conditions, encore envisagées avec peut être un peu de brassage lié au vent, qui est attendu.

Ce brassage et ce renforcement du vent n’aura finalement jamais eu lieu, le ciel restant couvert, bas (plafond à 200m, parfois plus bas) toute la journée. L’avion a ainsi été retardé 3 fois, avant de décider un report à un éventuel vol nocturne, qui pourrait se produire dans les prochaines heures. Côté météo, après une légère amélioration de la visibilité horizontale dans l’après-midi, on a terminé en beauté avec, juste avant le dîner, le retour d’une brume épaisse, limite brouillard, et surtout une chute de gros flocons qui nous a accompagné pendant tout le repas, pour me narguer définitivement, alors que le soleil perçait timidement la couche, au loin (voir la photo jointe, là aussi !), comme il avait déjà tenté de le faire en fin début, puis en fin de matinée. Ce qu’on appelle dans notre jargon de météorologues « les phénomènes de basses couches », très dépendants de conditions très locales, souvent micro-climatiques, le plus difficile à prévoir, en France ou ailleurs, ici.à plus forte raison, où la prévision reste un art encore un peu expérimental, bien que souvent gratifiant.

A l’heure où j’écris ces lignes (22h30), le suspense reste entier quant à la venue, en fin de nuit, de ce fameux avion, qui doit emporter vers Concordia deux sympathiques camarades de voyage, François et Jean-Louis, qui ne nous ont quasiment pas quittés depuis Roissy le 28 novembre, et qui ont installé à DDU un cielomètre, qui mesure le plafond nuageux, un instrument très intéressant et utile pour nous à Météo-France, même si cet installation se fait dans le cadre de leur propre programme de recherche. Nous avons donc un peu travaillé ensemble pour pouvoir bénéficier dans notre travail d’observation quotidien des mesures de leur instrument, et le résultat semble, jusqu’à présent, très satisfaisant ! Une belle collaboration et des échanges très sympas, qui resteront, et avec leur départ, malgré tout probable, et surtout souhaitable pour que les programmes scientifiques se fassent dans les délais impartis, c’est un nouveau marqueur du temps qui passe, puisque ça fera demain 1 mois que nous sommes sur la base, cette fois. Mais je parlais de suspense car, en regardant à ma fenêtre, le ciel semble gris et bien brumeux, je ne vais pas tarder à sortir pour aller analyser ça de plus près…

Une journée pas comme les autres, une journée de brouillard et de neige sous nuages bas à DDU, mais pour la grande majorité des adéliens, il s’agissait d’un agréable dimanche de repos, certes moins ensoleillé que prévu, mais que cette particularité météorologique n’a pas dû beaucoup troubler ! En tant que prévisionniste en poste, il y aura des jours meilleurs, mais sans doute météorologiquement moins curieux ! J’ai tout de même pu m’échapper une petite heure de la météo cet après-midi pour aller faire un petit tour sur l’île, notamment vers le Sud-Ouest, secteur du "mât iono", où je n’étais pas encore retourné. Il faudra y revenir par beau temps, s’il revient, car nous totalisons à peine 1h d’ensoleillement sur les 5 premiers jours de janvier, et c’était ce matin, dans la trouée ! En attendant, tout cela m’a quelque peu distrait de mes tâches de début de mois qui n’ont pas beaucoup avancé ce week-end, il va falloir accélérer cette semaine…. A bientôt !



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Commentaires
G
bonne année a toute l'equipe ......et bravo de nous faire vivre votre hivernage
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