8 novembre 2008
Entre ici et là-bas
Après l'ivresse de la victoire, les nombreux repas arrosés, il suffit que je retrouve 24h de sobriété pour me rendre compte de cette terrible évidence : je ne sais plus où je suis. Je ne suis pas plus parisien qu'adélien : la projection quasi-permanente dans le futur depuis de longs mois a décollé le décor qui m'entoure. Ca ne ressemble plus à grand chose. Que vais-je trouver là-bas de si extraordinaire qui puisse compenser ce que je laisse ici ? A quoi ressembleront les moments obscurs là-bas, par rapport à mes déprimes de citadin ? A quoi faut-i penser, au juste ? A ma vie parisienne, trop connue ? Ou à cette nouvelle vie adélienne, largement méconnue ?
Je ne sais pas, alors je scrute le passé, sans y trouver davantage d'indices sur ma position spatio-temporelle. J'imagine le futur, les futurs, un million d'ébauches de scénarii qui ne me distraient guère au delà du bref temps que je passe à les décrire. Sans repère. Je dois être dans une de ces parties coupées au montage du film, parce qu'on ne sait pas où les coller, dans quel cadre les situer. Mais elles existent bien, pourtant. Alors, bien sûr, la solution réside sans doute dans l'absence de pensées, soit l'exact contraire de ce que je fais en ce moment. Mais j'ai du mal, l'alcool aide c'est certain... Ce n'est pas une solution dans l'absolu, mais parfois je me dis qu'ivre jusqu'au départ, pourquoi pas !
J'ai l'impression d'être entré dans le temps où les paroles sont vaines, où il n'y a plus grand chose à dire ou à faire, compter les secondes, peut être... Ou alors écrire, écrire sur ce blog ou ailleurs, pendant des jours, des semaines, jusqu'au jour J, jusqu'à épuisement, pour décrire l'équation sans solution qui me retient prisonnier. A quoi sert ce blog ? Quel est le message que je veux faire passer ? Pour l'heure, une perplexité certaine face à cet état étrange. Probablement aussi les doutes qui m'habitent, décrire une impasse, fort heureusement temporaire, sans savoir situer cette impasse. Je ne dirais même pas que je suis impatient, car je ne ressens aucune excitation particulière. Je ne dirais pas non plus que je suis inquiet, car je me sens surtout dans un état d'indifférence globale.
Dans mon petit ghetto spatio-temporel, la lumière Obama, toujours aussi irréelle, brille bel et bien. Quelques jours plus tard, je n'arrive toujours pas à y croire. J'ai regardé des dizaines de video de foules en liesse aux US, comme à travers le monde, hypnotisé par ce tsunami d'espoir au milieu d'une époque bien sombre. Dans ces moments là, c'était comme de la drogue, toutes mes petites questions existentielles disparaissaient comme par magie... Je crois que le monde avait besoin d'une telle drogue, à cet instant de l'Histoire, particulièrement aux Etats-Unis d'Amérique. Mais cela vaut également pour moi, naturellement. Je maintiens que la force d'un symbole, une vague d'espoir, sont des moteurs plus puissants que bien des actes. Avant de changer le portefeuille des gens, changer l'état d'esprit. C'est la dimension Obama. Parce qu'il est brillant, qu'il incarne la nouveauté, le dynamisme, l'ouverture, qu'il a une classe inouïe. L'homme politique idéal que j'aurais demandé au Père Noël, en quelque sorte !
Et tant pis si on s'aperçoit, de façon si prévisible, qu'il n'est pas le messie, qu'il se plante sur certains sujets. Ces jours là auront existé, et resteront gravés dans la conscience collective, contribuant ainsi à changer notre vision du monde. Dans une époque de vaches maigres, qu'exiger de plus d'un leader politique ? Ce sont les côtés irréversible, irrésistible d'Obama que j'aime. Un jour, quand je serai allé là-bas, après ce long séjour, il en restera quelque chose. Merci au président Obama ! Un véritable regret : celui de manquer la cérémonie d'investiture le 20 Janvier 2009, à Washington. De même que celui d'être resté à Paris, alors que dans l'absolu rien ne me l'imposait, quand l'Histoire s'écrivait de l'autre côté de l'Atlantique, notamment à Chicago. OK, on en fait trop avec Obama, ça devient ridicule, mais on ne rassasie pas un affamé avec deux miettes de pain...
Par ailleurs, j'ai été confronté à un exercice difficile ce vendredi : il m'a fallu rédiger une petite note dans laquelle je devais me décrire brièvement, afin d'accompagner le petit journal que je vais animer sur le site de Météo-France à mon arrivée à DDU. Ce ne fut pas simple, parce que je ne savais pas jusqu'à quel niveau me décrire, ni à qui je m'adresserais. Je me suis donc posé les mêmes questions que celles que je me suis déjà souvent posées au sujet de ce blog : pourquoi ? Pour qui ? J'ai donc fait un résumé de quelques lignes de mon parcours et mes motivations, tant à Météo-France que vis-à-vis de l'Antarctique. Mais j'ai eu tendance à en dire moins que ce que je dis sur ce blog, comme si j'avais un peu peur de la petite exposition médiatique que me procurera le label Météo-France. Fondamentalement, ça ne change pas grand chose, les lignes que j'écris en ce moment sont probablement aussi bien lues par des gens que je ne connais pas que celles que l'on trouvera sur le site de MF.
Enfin, des nouvelles de la première rotation de l'Astrolabe : dantesque, d'après les bruits qui me sont parvenus. Il a fallu calfeutrer les hublots afin de résister aux paquets de mer qui s'abattaient, menaçant de les faire exploser. Ca promet pour dans trois grosses semaines... Honnêtement, ça ne me fait pas plus peur que cela, je trouve ça plutôt amusant, mais je risque de déchanter une fois en situation ! Autre nouvelle rapide, l'aventurier Mike Horn, dont j'avais critiqué le livre sur ce blog l'an passé, va apparemment nous rendre visite à DDU vers le mois d'avril ! Il est en effet parti en solitaire avec son traîneau, à pied, depuis la péninsule antarctique, à des milliers de kilomètres à l'Ouest, pour une traversée Ouest-Est du continent, et son point d'arrivée sera DDU. Drôle de rencontre en perspective...
Allez, il est temps de retourner dans le néant après ces quelques distractions d'actualités, à bientôt. Heureusement qu'il y a Toulouse la semaine prochaine, puis j'espère un peu de Corse pour m'occuper d'ici la fin du mois... Pour revoir l'île de Montecristo, star bien connue des lecteurs de ce blog, comme en janvier 2007, le matin (avec l'île de Giglio à gauche), et le soir...
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