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Itinéraires polaires
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7 mai 2007

Réflexions post-éléctorales

Bon, je n'y tiens pas, je me dois de commenter la fin de cette campagne éléctorale que j'ai fortement suivie, bien qu'étant loin, grâce à Internet, d'autant que j'en retire des impressions assez tranchées. Cette campagne a finalement été un bon révélateur de l'état actuel de la France, le moins que l'on puisse dire est que cela n'engage pas à un franc optimisme. Le résultat de ce dimanche soir était, finalement, annoncé avec une remarquable précision par les instituts de sondage, et ce depuis des semaines. A se demander à quoi à bien pu servir la campagne elle-même, tout cela pour une opinion publique qui n'a finalement pas tellement bougé entre le début et la fin. le seul événement un peu exotique fut le rôle de François Bayrou dans cette histoire.

Au delà de l'ennui que pouvait provoquer ce scénario apparemment écrit d'avance et dont la réalisation n'a absolument pas fait défaut, l'autre fait marquant, qui peut sembler paradoxal et contradictoire avec cela, c'est la forte participation, tant au premier tour qu'au second. Je n'y vois qu'une seule explication : l'emergence d'une nouvelle génération dans la classe politique, et par conséquent une sensation de renouveau. "La démocratie a gagné !", ai-je entendu plusieurs fois à ce sujet. Si on entend par démocratie, le règne des apparences, des postures, de la communication à outrance, alors oui c'est une grande victoire de la démocratie. J'en veux pour preuve le grand "gourou" de la communication Jacques Séguéla, qui orchestra la campagne mitterandienne en son temps, qui soutenait Ségolène Royal au premier tour, avant de tourner sa veste pour raisons professionnelles entre les deux tours, sentant bien là où se trouvait l'avenir de son business. Il déclarait d'ailleurs dans une interview que la communication, avec ceux-là (parlant de Ségo et Sarko), avait de beaux jours devant elle...

C'est donc une grande victoire pour les marchands de rêve, ceux qui savent le mieux coller aux désirs des français, quand il ne s'agit pas tout simplement de les susciter. Finalement, on a bien eu la preuve que, pour accéder au pouvoir, la fin justifie les moyens. Ce n'est pas nouveau, et cela a probablement toujours été le cas dans l'Histoire, mais ce qui a changé profondément, c'est qu'aucune époque historique n'a connu une telle puissance des médias, et donc une telle influence sur l'opinion publique. Qui contrôle, maîtrise les médias, gagne à coup quasi-sûr à la fin. On a bien vu que Nicolas Sarkozy était un maître du genre, sachant tirer toutes les ficelles en la matière.

Quand je l'ai entendu déclarer à ses partisans rassemblés place de la Concorde : "je vous demande de donner l'image d'une France réunie, qui tend la main...", j'ai cru rêver ! Oui, notre nouveau président demande là aussi de donner des images en pâture, peu importe le fond de réalité derrière, du moment qu'on donne les bonnes images... C'est une nouvelle fois la preuve que le fond s'est vraiment éclipsé au profit de la forme. La France est profondément divisée ? Faisons comme si de rien n'était, tendons les mains devant les caméras, ce qui se passe en off, tout le monde s'en fout, puisqu'on le verra/saura jamais...

Quand je l'ai entendu déclarer : "la fatalité ne fait pas partie de mon vocabulaire", je me suis demandé s'il s'agissait du même personnage qui prônait la nette domination de l'inné sur l'acquis, se défaussant ainsi de sa responsabilité en face de certains problèmes... S'il échoue à reconcilier le pays, c'est donc qu'il y aura des gens génétiquement programmés pour être des agitateurs, quand ce n'est pas pire ! Il est bien clair que ce genre de discours réfutant la fatalité est de ceux qu'il est agréable d'entendre de la part d'un leader, mais dans sa bouche il est pour le moins surprenant, pour ne pas dire plus.

Enfin, et c'est peut être le plus symbolique, le plus symptomatique de ce que j'ai entendu hier soir, quand il déclare qu'il a redonné aux élécteurs "le goût de la France", une certaine tristesse m'envahit. C'était donc ça, le but de cette éléction ! Faire resurgir le nationalisme archaïque, presqu'anachronique. Mais qu'est-ce que la France dans le monde actuel ? Une nation parmi tant d'autres, qui n'a plus pour vocation d'exister face aux autres dans un monde globalisé, mais AVEC les autres. Le nationalisme qui a été initié dans cette campagne par Nicolas Sarkozy, qui a été malencontreusement repris par Ségolènr Royal est toalement absurde et décalé de l'époque que nous vivons, je dirais même qu'il joue à contre-emploi. En exacerbant ce nationalisme d'un autre temps, la France se replie sur elle-même, se donne une importance, une contenance qu'elle a perdu depuis longtemps, bien que cela reste évidemment, par sa puissance économique, une des grandes nations de ce monde. Ce discours, en plus de me mettre mal à l'aise quand il est prononcé par un homme qui a déclaré "être fier que, nous, en France, n'ayons pas inventé la Shoah", n'a guère de raisons d'être dans un monde où l'échelle des problèmes majeurs dépasse de loin le cadre franco-français...

Que les choses soient claires, je ne croyais pas sérieusement en Ségolène Royal pour autant, j'aurais voté Bayrou par vote contestataire "utile" (une grande notion à la mode) au premier tour, si j'avais pu voter (voir mon billet début mars). Finalement, je ne regrette pas de ne pas avoir voté, parce que j'ai l'impression que les sujets abordés par nos candidats sont bien éloignés de la réalité du monde qui nous entoure, l'écologie a été enterrée vite fait, on verra bien ce qu'il en ressortira, mais rien n'incite à un bel optimisme là non plus. La question se pose donc sincèrement de savoir si cela a un sens d'aller voter quand aucun candidat n'a de discours responsable et crédible sur les questions majeures de notre époque. La campagne s'est centrée sur la France parce que nos chers candidats, nourris aux sondages d'opinions, se sont focalisés sur les problèmes individuels de chaque élécteur, on a l'impression qu'il a été quasiment impossible d'avoir une certaine hauteur de vue. De facto, la place et le rôle de la France dans le monde, le règlement des questions écologiques n'étant pas, loin s'en faut, au premier rang des préoccupations des français, aucun responsable politique n'en a fait son thème de campagne majeur...

Il paraît qu'on a les responsables, les hommes politiques, qu'on mérite, alors nous avons dû être bien médiocres pour en arriver là. Si ceux là, par leurs discours, représentent bien la France, alors la France n'est plus une grande nation. Et c'est d'autant plus absurde d'exalter le patriotisme et le nationalisme ! A la rigueur, s'il y avait une entité commune qu'il serait utile de mettre en exergue, à tous points de vue, ce serait l'Europe ! On en a si peu parlé... L'Europe en tant qu'entité a un vrai poids, un vrai rôle à jouer dans le monde, tant au niveau diplomatique qu'écologique, par exemple. Bref, je ne suis pas très fier d'être français actuellement, on pourra se gargariser bien longtemps encore de ce formidable élan de participation, ce n'est là aussi qu'un trompe-l'oeil qui prouve juste que le système est bien huilé, les communiquants ont bien fait leur boulot en endormant les gens, en montant un deuxième tour des mois avant l'éléction afin de faire prendre la mayonnaise, en séléctionnant par la suite les petites phrases qui font mouche pour alimenter le "débat", il suffisait d'attendre les éléctions pour récolter les fruits. Il était plus facile de communiquer avec des "jeunes" comme Sarko et Ségo qu'avec Chirac et Jospin...

La notion de communauté de destin a-t-elle encore un sens dans cette France qui me semble, depuis que j'en ai pleine conscience, plus divisée que jamais ? Probablement pas, parce qu'il lui manque une idée forte, porteuse d'avenir qui puisse mettre tout le monde en marche, ce pourrait être l'Europe, le défi écologique qui est si fondamental. J'ai vraiment le sentiment que le pays est tendu, retranché derrières des égoïsmes partisans, ça ne donne pas une folle envie de revenir. D'ailleurs, plus le temps passe ici, plus je considère avec sérieux l'opportunité d'aller, un jour, m'installer de ce côté-ci de l'Atlantique, dans un climat, une atmosphère sociale qui me semblent incomparablement apaisés. Probablement pas aux Etats-Unis (quoique, l'Alaska...) mais sinon le Canada : pays des grands espaces par excellence avec ses montagnes, ses lacs, ses rivières, ses forêts à perte de vue, où l'on peut se tenir à l'écart de la folie, de l'inconscience collective des hommes, dans des communautés qui ne misent pas tout sur l'apparence et le surperficiel. Après tout, je ne suis pas lié à vie à Météo-France, ça m'étonnerait de plus en plus que je m'y éternise d'ailleurs, si la météo canadienne m'offre une opportunité dans le futur...

Pourquoi pas, idée encore plus folle, prendre la nationalité canadienne ? Bon là je pousse un peu le bouchon, mais c'est vrai que cette idée de nationalité me gêne, ça représente quoi, concrètement, aujourd'hui ? Quand je reviens de chez les Inupiaq à Barrow et que je réalise qu'ils sont américains, je me dis que ça n'a vraiment aucun sens, tant ils n'ont rien à voir, à l'origine, avec la culture américaine... Pourquoi devrait-on avoir une nationalité, quand cela ne signifie plus grand chose ? A l'époque où des hommes se sont unis pour conquérir des droits, défendre des libertés derrière une même bannières, cela avait probablement un sens, mais de nos jours, dans un monde dans lequel les "ennemis" ont totalement changé d'aspect ?

"La France, on l'aime ou on la quitte", c'est donc en reprenant les paroles de notre nouveau Président que je concluerai cette note, si ce n'était pas là une invitation à aller voir si l'herbe est plus verte ailleurs, je me demande bien ce dont il s'agissait. A partir du moment où la notion de communauté de destin a disparu d'une nation déchirée, je ne vois pas ce qui me ferait défaut en la quittant. Effectivement, on n'a pas à accepter d'être prisonnier d'une nation qui n'a jamais aussi peu ressemblé à l'idée qu'on s'en faisait, à un idéal de société harmonieuse qu'on n'a pas abandonné. Cela dit, je souhaite me tromper sur toute la ligne au sujet de Sarkozy, pour le bien de tous. Mais certaines illusions ne passent plus.

P.S : Cette note a été bien sûr écrite sous le coup d'une grande déception mûrie lentement depuis ces dernières semaines, il ne faut donc pas tout prendre au pied de la lettre, mais les préoccupations exprimées ici sont sincères, réelles, et auront sans doute un impact dans la direction future que je donnerai à ma petite existence. Ciao !
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Commentaires
S
comme (trop?) souvent, entièrement d'accord avec toi... <br /> Parlant d'images, tu as de la chance de ne pas avoir la télé: cela t'a épargné mireille mathieu chantant la marseillaise place de la concorde... ah, la rupture... avec le XXIe siècle, peut-être?
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M
Rien à ajouter... si ce n'est que moi aussi je n'exclus pas de retourner dans ce beau pays un de ces 4 !! J'espère juste que ma motivation première ne sera pas de fuir la Sarkozie.. <br /> Biz
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L
Eh bien...Tu vas pas devenir un coupeur de bois quand même? ;) Je plaisante!<br /> <br /> Figure toi que je suis d'accord avec toi, à tel point que je me suis abstenu en fait...<br /> On m'a pas mal reproché de ne même pas avoir voté blanc, mais je considère que se déplacer pour un de ces deux guignols ne m'apporterait rien, et surtout pas un comportement "citoyen". Peut-être pour me dire que au moins, je me suis pas sali les mains...<br /> <br /> bonne continuation fréro<br /> <br /> ++
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